Le danois Morten Jensen vient d'être acquitté par la cour d'Assises du Maine et Loire alors qu'il était jugé pour "homicide involontaire", en fait une euthanasie active au sens de la loi. Son épouse, française, était en phase terminale d'un cancer douloureux. L'avocat général, représentant l'Etat, avait requis une peine "de principe" de 2 ans de prison avec sursis afin que l'euthanasie active ne soit pas "légalisée" par un acquittement. Au terme d'un court délibéré, le jury populaire d'Angers ne l'a pas suivi, choisissant l'acquittement en à peine une demi-heure. Ce nouveau procès de l'euthanasie, qui en appelle encore bien d'autres, pose de nombreux problèmes. Tout d'abord le libre choix de disposer de sa propre vie, notamment dans des circonstances extrêmes comme les longues maladies incurables. D'autre part, la dignité de l'individu face à la douleur et à la déchéance inéluctable. Ensuite, le rôle de l'entourage, quand un individu n'est plus en mesure d'agir par lui même face à la souffrance. Enfin, l'inadéquation de la loi, face à ce qui relève de l'intime et de la mort, de la liberté de choix et de la conscience.
En France, la justice d'Assises est une justice populaire. Le jury a choisi l'humanité au delà des considérations de légalité ou d'exemple. Pour ma part je m'en réjouis.
Humanité, c'est un mot si rarement à l'ordre du jour.
Depuis l'affaire de Chantal Sébire, je n'ai pas réussi à me sortir de l'esprit la souffrance de cette femme qui a tout sacrifié dans un ultime élan pour communiquer et faire comprendre son désir de mourir. J'ai été profondément touché par son témoignage et sa force à montrer ce que la société aime à cacher. Aujourd'hui on voit trop souvent un mauvais réflexe de la part des gens. Celui de cacher la maladie, de banir la mort, le deuil. D'en finir avec les aspects les plus intimes de la fin de vie. Pourtant parler de cela est necessaire... on voit tellement d'ailleurs de famille totalement esseulées face à un deuil... On voit tant de personne etre au plus mal, des années après la mort d'une mère, d'un père... la société n'ayant aucune capacité à donner un sens à la mort et à la fin de vie. Chacun autour de soi a d'ailleurs connu un jeune homme ou une jeune fille qui aura vu partir un proche des suites d'une maladie longue et douloureuse. Chacun aura vu plonger ces gens dans le deuil ou une souffrance... la dureté de cette expérience est d'autant plus lourde que la fin de vie du malade a été pénible... Aussi, la loi sur l'Euthanasie aurait pu alleger la souffrance des familles et des malades... Neanmoins des réticences existent. Le corps médical n'est pas pret. Je vois d'ailleurs souvent un jeune urgentiste qui considère que la loi Léonetti est suffisante. On comprend son point de vue de medecin... qui veut sauver des vies et dont le tabou est de donner la mort. Certes il avoue que parfois on "morfine" le patient... on tente de lui adoucir sa faim... la dignité humaine est donc là... au point de jonction de la maladie, du corps médical, de la famille et d'une société qui elle se veut aveugle.
La loi sur l'Euthanasie neanmoins ne semble pas suffire face aux exceptions et face au manque de place en soin paliatif. On peut d'ailleurs voir le témoignage de Mr Romero sur le NouvelObs qui considére qu'on doit apporter plus aux unités de soins palliatifs. Neanmoins, lorsqu'on porte son regard sur les décisions des gens concernant l'eventualité d'une euthanasie, ils repondent dans l'affirmative si leur corps ne répondait plus... mais lorsque la mort est proche, qu'elle rode et vous effleure, on se consume dans l'intime et la vraie réalité. Chacun alors peut se trouver en souffrance physique et ne pas vouloir faire le grand saut... voilà, la problématique d'une loi... Je rappelerai aussi le témoignage de Leonetti dans "Vivre ou Laisser Mourir". Il rappelle que des vieillards veulent partir lorsque leur famille n'est plus présente... ils se sentent comme un fardeau vis à vis du corps médical ou tout simplement vis à vis de leur proche. Il y a aussi le corps médical qui parfois abuse de son indifférence et qui ne voit plus les chambres des patients en fin de vie... le moral du patient alors est en berne et le désir de mort est d'autant plus vif... Aussi, l'Euthanasie est complexe. Une loi existe deja et il serait bon de multiplier les unités de fin de vie, il serait utile enfin de creer une instance capable de résoudre les problemes insolubles au quotidien...
Le point positif aujourd'hui est que le législateur ne veut plus répondre par une loi faite à chaud. Mieux vaut pousser les débats dans le calme... mieux vaut apprendre aussi à mourir. Apprendre à respecter la mort. La réhabilité au niveau de la société...
Rédigé par : Yannick Comenge | 02 avril 2008 à 23:13